Pourquoi tant de personnes minimisent-elles les abus?

Cette question on me la pose souvent et elle semble traduire une détresse vécue par de nombreuses victimes d’abus. J’avais déjà un peu abordé cette thématique il y a quelques semaines et je vous propose de continuer la réflexion en répondant rapidement ce matin à la question. Partons d’une situation tellement classique: une victime raconte son histoire et se heurte à des réactions déconcertantes de la part de son interlocuteur du jour, avec des phrases dont on avait déjà parlé ensemble sur ce blog: « ce n’était pas si grave », « il faut tourner la page », »pense au futur il faut aller de l’avant » ou encore « j’te rassure tout le monde a des problèmes »…
J’ai tendance à dire qu’on touche là le degré d’empathie de la limace, et encore…
Mais restons du côté Esprit Psy et tentons de mieux comprendre pourquoi ces phrases peuvent être dites, sans les excuser pour autant car elles restent violentes et/ou culpabilisantes et/ou abandonniques.
Influencer notre cerveau, progressivement, c’est possible!

Aujourd’hui je vous propose un petit programme pour booster votre impact neurochimique!
Alors bien entendu il ne s’agit pas de contrer les tsunamis émotionnels ressentis par certains ou certaines selon les moments, mais plutôt de créer une gymnastique vertueuse dans les moments plus calmes où le conscient peut agir avec plus de puissance.
Je m’explique: en prenant prise progressivement sur la production de certaines substances en soi, nous pouvons améliorer notre ressenti et parfois de manière très sensible.
Alors voilà, il me semble que dès que l’on saisit que notre bien-être n’est pas seulement une question d’état d’esprit ou de circonstances extérieures, qu’il repose aussi sur un équilibre biochimique subtil orchestré par notre cerveau, hé bien un levier d’action peut se profiler à l’horizon!
Je précise pour ceux qui le découvrent que nos émotions, notre motivation et notre résilience face au stress sont directement influencées par un ensemble de neurotransmetteurs qui modulent nos sensations de plaisir, de satisfaction et d’apaisement. Parmi eux la DOPAMINE, souvent qualifiée de « molécule de la motivation », joue un rôle clé dans le plaisir et la récompense, héhé. Donc chaque fois que nous atteignons un objectif, aussi minime soit-il, notre cerveau libère une dose de dopamine ce qui nous incite alors à reproduire le comportement qui a conduit à cette satisfaction! C’est pourquoi j’invite tout le temps mes patients à célébrer les petites victoires dès que possible, chaque jour, qu’il s’agisse par exemple de cocher une tâche sur une liste, de partager avec un être cher un effort réalisé, de s’octroyer une récompense (bain, soin, petit plat, câlin, ou autre!) en lien avec un petit objectif atteint, etc.
Parlons maintenant de la SÉROTONINE qui est en autre impliquée dans la régulation de l’humeur et du sentiment de satisfaction. L’exposition à la lumière naturelle augmente les niveaux de sérotonine, expliquant ainsi pourquoi un simple bain de soleil peut améliorer notre moral. Pratiquer l’exercice de noter 3 choses par soir positives de notre journée, des choses où l’on est content de soi, constitue également un excellent moyen d’amplifier cette production. Il y a aussi par exemple l’automassage (nuque, épaule tempe,…).
Ensuite, il y a l’OCYTOCINE, surnommée souvent l’ »hormone du lien social », qui joue un rôle dans l’attachement et l’apaisement. Libérée lors des câlins, des interactions bienveillantes ou même d’un simple contact physique sécurisé (y compris avec son animal de compagnie) elle crée une sensation de confiance et de sécurité. Et bien entendu elle contribue à faire baisser le stress!
Enfin, les ENDORPHINES, véritables antidouleurs naturels, sont identifiées pour leur effet euphorisant et relaxant! Super effet! Elles sont principalement stimulées par l’activité physique, le rire et même la consommation de chocolat noir (pas trop non plus ) grâce à la présence de composés favorisant leur libération… Trois petites choses que je conseille et qui fonctionnent pour forcer la production d’endorphines: se forcer à rire, c’est peut-être bizarre a priori, mais si l’on fait cet exercice, on en arrive presque à rire du fait que ça a l’air stupide… Du coup, même avec un peu de rire sur soi-même pendant cet exercice il va s’opérer une libération des endorphines…
Se sentir mal d’aller bien…

Aujourd’hui je réponds à une question qui m’est régulièrement posée sous une forme proche de celle-ci: »pourquoi je me sens coupable ou mal quand ça va un peu mieux pour moi? »…
Cette question ouvre plusieurs pistes d’exploration et je vais vous en proposer certaines.
En première approche je dirais que ce sentiment de culpabilité ne surgit pas par hasard, qu’il est bien souvent le produit d’une construction psychologique (issue d’un contexte familial et social) qui façonne notre rapport à la souffrance et au bien-être. La culpabilité peut être généralement associée à des conflits internes et des loyautés inconscientes qui remontent à l’enfance. On parle du surmoi en psychanalyse, rappelons que c’est une instance psychique qui enregistre les interdits et les normes transmises par l’environnement familial et sociétal. Or chez certaines personnes ce surmoi peut devenir particulièrement rigide ce qui peut générer une sensation de »faute imaginaire » dès lors qu’elles accèdent à un état de bien-être. Prenons l’exemple d’un enfant qui a grandi dans une famille marquée par la souffrance, la maladie ou la précarité par exemple, une thérapie analytique peut mettre en lumière que cet individu aura assimilé l’idée que la douleur est un mode de vie légitime, voire une preuve de loyauté envers sa famille… Et que donc adulte, il peut se heurter à un conflit intérieur: »si je vais bien, est-ce que je trahis mes parents qui ont tant souffert? »… Cette culpabilité agirait alors comme une dette invisible où le bien-être semble devoir être payé d’un prix, comme si le bonheur était finalement un luxe auquel on ne peut prétendre sans en subir les conséquences! Merci la famille…
Maintenant au-delà de l’individu, certaines familles et environnements sociaux peuvent véhiculer un message implicite selon lequel »s’en sortir », c’est rompre un pacte tacite de solidarité dans la souffrance. Régulièrement en travail thérapeutique je peux observer que si dans une fratrie l’un des membres reste dans la difficulté, la personne en analyse qui parvient peu à peu à s’épanouir pourra parallèlement éprouver un profond malaise: »pourquoi moi et pas mon frère ou ma sœur? »… Et il m’apparaît que ce type de culpabilité reste particulièrement marqué dans les familles où la résilience individuelle est perçue comme une forme d’égoïsme ou de trahison envers le collectif ( »tu n’as pas le droit d’aller mieux que nous » reste le message implicite).
Le biais de négativité

Je vous propose de parler précisément de l’un des biais cognitifs les plus puissants et qui nous enferme trop souvent dans une perception tronquée de la réalité: le biais de négativité. C’est ce biais qui nous pousse à accorder bien plus de poids aux expériences désagréables qu’aux moments agréables ce qui influence notre attention, notre mémoire et nos réactions émotionnelles!
Parmi les nombreuses études démontrant ce biais, je vous en propose ici deux dont les résultats peuvent nous interpeller:
Gottman et Levenson (1992) ont analysé les interactions conjugales et établi que pour maintenir une relation stable un couple devait avoir au moins 5 interactions positives pour compenser une interaction négative (ce qui est souvent interprété comme un ratio de 5:1).
Fessler et al. (2004) ont étudié la réactivité émotionnelle et suggèrent que la réponse cérébrale aux événements négatifs peut être trois à cinq fois plus forte qu’aux événements positifs…
Donc on comprend mieux pourquoi une critique nous affecte plus qu’un compliment, pourquoi un échec reste imprimé dans notre mémoire plus profondément qu’une réussite et pourquoi une journée entière peut nous sembler gâchée à cause d’un unique événement frustrant!
Je le rappelle, cette tendance a une explication évolutive: pour nos ancêtres lointains, mieux valait se souvenir du danger que d’un coucher de soleil!
Mais aujourd’hui cette »hypervigilance au négatif » peut nous desservir plus qu’elle ne nous protège, nous laissant souvent avec une impression de malaise persistant et une vision biaisée de notre environnement immédiat, un peu comme si nous étions sous le coup d’une menace floue.
Mais heureusement si je puis dire, nous pouvons renverser dans une certaine mesure cette tendance en entraînant notre cerveau à percevoir davantage le positif. C’est Martin Seligman (2005), l’un des pionniers de la psychologie positive, qui a démontré qu’un exercice simple pouvait déjà suffire à modifier (parfois en profondeur) notre perception du quotidien. Un exercice efficace que je propose souvent en consultation consiste à noter chaque soir trois éléments positifs de la journée. Il ne s’agit pas forcément de grandes victoires ou de succès retentissants mais de détails parfois anodins comme un échange agréable, une blague qui nous a fait sourire, une musique qui nous a procuré du plaisir, une sensation agréable en buvant un café ou un thé chaud, etc. C’est en répétant cet exercice pendant plusieurs semaines (j’insiste, plusieurs semaines, donc après l’avoir intégré dans une routine…), que notre cerveau commencera à détecter naturellement plus de positif comme s’il recalibrait peu à peu son filtre de perception.
L’hypersensibilité est une caractéristique, pas une personnalité!

L’hypersensibilité est un sujet qui peut pousser à faire des amalgames. Le premier serait de faire de la caractéristique d’hypersensibilité une carte de visite, une donnée qui réduirait l’individu à une caractéristique unique.
Ce serait à mon sens très réducteur, générateur de confusion.
En préalable, concernant les ressentis en lien avec l’hypersensibilité, comme pour toute autre caractéristique, il y aura sans doute de multiples témoignages possibles et gardons à l’esprit que les facteurs de vie ne peuvent pas être calqués d’une personne à l’autre. Ainsi l’hypersensibilité d’une personne ne sera pas l’hypersensibilité d’une autre personne, ce qui rend d’ailleurs le concept si propice aux discours affirmatifs de tout un chacun.
Pour avoir pris le temps de lire de nombreux témoignages depuis plusieurs années, il me semble que certaines personnes, sur les forums regroupant des personnes dites hypersensibles, oublient bien souvent que l’hypersensibilité:
– est définie comme une caractéristique,
– ne définit donc nullement une personnalité ni une orientation des ressentis émotionnels
– n’est pas une pathologie et n’est pas la cause de pathologies annexes.
Si l’on perd de vue cela, on pourra projeter/superposer sur une hypersensibilité beaucoup de choses.
Or lorsqu’on considère le parcours de vie exprimé par certaines personnes, elles semblent en difficulté pour différencier la caractéristique d’hypersensibilité, d’une part, et de l’autre l’ensemble des autres paramètres qui influencent leur vécu émotionnel et sensoriel.
Je le redis, ces paramètres n’empêchent nullement la caractéristique d’hypersensibilité d’être présente et de s’exprimer comme amplificateur si cette dimension est effective chez un individu (j’en profite pour rappeler que l’hypersensibilité n’est d’ailleurs pas forcément d’avoir toutes les dimensions à »taux maximum »…)
Pour ne citer que quelques-uns des paramètres, indépendants les uns des autres, ou pour certains cumulés entre eux, qui peuvent exacerber depuis l’enfance l’hypervigilance, l’acuité sensorielle, l’hyper-empathie, les émotions submergeantes, les émotions amplifiées dans les deux sens, le sentiment global de fragilité émotionnelle, le vécu d’une charge mentale extrême et chronique, la méfiance, le sentiment de vide, le sentiment de solitude, le ressenti d’abandon, etc, nous pouvons mentionner :
Somatisation: quand l’esprit parle avec des maux que l’esprit ne peut pas dire

Je croise régulièrement des personnes qui traversent des années d’errance médicale sans qu’aucun examen ne puisse expliquer ce qu’elles ressentent: par exemples fatigue persistante, migraines récurrentes, douleurs abdominales inexpliquées, palpitations soudaines, oppressions thoraciques, tensions musculaires diffuses ou encore insomnies chroniques.
D’autres font face à des troubles plus spécifiques comme une chute de cheveux continue (alopécie), des douleurs pelviennes inexpliquées, des cystites à répétition qui ne révèlent aucune cause organique, ou encore pour d’autres des troubles digestifs handicapants malgré des analyses normales.
Ce sont tous des symptômes bien réels, souvent invalidants, qui pourtant échappent à toute explication médicale traditionnelle.
C’est à ce moment-là qu’une autre hypothèse mérite d’être envisagée : celle de la somatisation.
La somatisation ne signifie pas que la douleur est « imaginaire » ou « exagérée ».
Bien au contraire, c’est une véritable manifestation corporelle qui traduit une charge psychique non résolue, une douleur émotionnelle qui s’est enkystée et que le corps exprime à sa manière.
Je me souviens d’une patiente qui pendant des années a souffert de crises de tachycardie violentes. Chaque fois qu’elle participait à certaines discussions son cœur s’emballait à un point tel qu’elle était persuadée d’avoir un problème cardiaque grave. Après des consultations et des examens approfondis, les médecins lui ont assuré que son cœur était en parfaite santé. Mais son corps, lui, réagissait comme s’il était en danger de mort.
Avec le temps tu finiras par oublier ton traumatisme… NON!!!

Le traumatisme s’ancre profondément, comme une sorte de trace brûlante dans l’inconscient et dans le corps et, chose que je trouve immensément cruelle pour la victime, il ne se dilue donc pas dans les jours qui passent.
Pour certaines victimes, quand il ne brûle pas directement, au mieux il couve, il hiberne quelques temps si je puis dire pour souvent d’un coup se réactiver par exemple à travers des sensations, des peurs inexpliquées, des cauchemars ou une hypervigilance permanente (comme si la menace n’avait jamais réellement disparu).
Gardons à l’esprit que ce qui caractérise le traumatisme, ce n’est pas tant le souvenir de l’événement que la façon dont il reste bloqué dans un présent perpétuel, échappant au processus naturel d’intégration (historisation) qui permet habituellement de reléguer les souvenirs difficiles au passé.
J’ai souvent entendu des patients me dire, à peu de choses près : « je sais que c’est fini, que c’est du passé ce qui m’est arrivé, mais une part de moi semble
Il n’y a pas de prescription pour les victimes d’abus!

Il n’y a pas de prescription pour les victimes d’abus : l’histoire ne se termine jamais vraiment.
J’ai eu un échange hier avec un individu qui critique la destructivité manifeste (alcool et autosabotage) d’une autre personne. Je souligne qu’il est connu que cette dernière a été abusée à l’enfance. L’autre me dit d’un ton catégorique : »bah il est temps qu’elle passe à autre chose, de l’eau a coulé sous les ponts depuis, non? ».
J’ai répondu »non ».
Car ce n’est pas une question de volonté.
Je le répète : ce n’est pas une question de volonté !
Beaucoup de personnes ayant subi des abus dans leur enfance portent en elles une souffrance qui ne se guérira jamais entièrement avec le temps. Et cela, même si elles semblent avoir «tourné la page» à l’extérieur. Que ce soient par exemple (il y en a bien d’autres encore), des abandons, des violences physiques, de l’abus narcissique, des violences sexuelles, un climat incestuel ou incestueux, ou encore être témoin de violences conjugales, ces blessures profondes continuent de se manifester à travers les décennies. Il n’y a pas de répit.
Ce que beaucoup semblent oublier ou ne pas savoir, c’est que le traumatisme n’a pas de date de péremption. Il s’installe, se cache et surgit parfois des années plus tard dans une sorte de tourbillon invisible.
Les résolutions annuelles: pourquoi elles échouent

Notre cerveau, cet adorable petit organe, a du mal avec les grands changements. Il aime la régularité et l’habitude, ce qui veut dire que de passer de « je ne fais rien » à « je fais à fond » peut être un poil trop ambitieux.
On le sait, mais j’insiste encore, la volonté seule ne peut la plupart du temps pas suffire à contrer des années d’habitudes.
Je vous propose directement ici 4 points qui peuvent aider à faire tenir les résolutions de janvier :
DÉVELOPPEMENT MORAL – Modèle de Kohlberg

Cet article présente le modèle de développement moral de Lawrence Kohlberg qui est l’un des cadres théoriques les plus influents dans le domaine de la psychologie morale. Développé dans les années 1950 et 1960, ce modèle vise à expliquer comment les individus développent leur capacité à juger moralement au cours de leur vie. Le modèle de développement moral est basé sur une série d’étapes progressives, chacune représentant un niveau supérieur de raisonnement moral comme le propose Kohlberg.
Kohlberg a expliqué son modèle en affirmant que le développement moral est un processus progressif, où chaque stade représente une compréhension plus sophistiquée de la moralité que le précédent.
Selon ses propres mots, en 1971, « La moralité de l’action dépend de la manière dont l’acteur structure la situation, et non simplement des valeurs et des règles morales suivies ».